LE JOURNAL : On fête cette année les 30 ans de la Convention internationale sur les droits de l’enfant. Doit-on s’en réjouir ou au contraire s’alarmer de la situation encore chaotique dans certains pays ?
YVES RÉVILLON : “Le 20 novembre 1989, les droits de l’enfant ont en effet été officiellement reconnus par l’Organisation des Nations-Unies. Ce traité n’affiche pas seulement des intentions : les pays qui l’ont ratifié sont tenus de respecter les 54 articles qui la composent. Son champs d’action est large puisqu’il concerne aussi bien l’éducation que la santé ou encore le respect de l’intégrité physique. Le texte a d’ailleurs permis de nombreuses avancées : baisse du taux de mortalité, éradication de certaines maladies, scolarisation. Bien sûr, ces progrès ne sont pas suffisants et il reste énormément de points à améliorer. Des millions d’enfants sont encore victimes de la guerre ou du travail forcé. De trop nombreuses jeunes filles sont encore mariées de force. Le travail reste immense et nécessite de maintenir les efforts, spécialement dans les pays les plus pauvres où les enfants sont souvent les premières victimes des conditions de vie difficiles.”
JBC : Quelle est selon vous la dimension la plus importante des droits de l’enfant ?
YR : “Le droit à l’éducation est à mon sens la clé de l’avenir. L’école est essentielle pour chaque enfant parce qu’elle offre aux plus jeunes l’accès à la connaissance et par ce biais la possibilité de se construire en tant qu’individu. Pas de mieux-être, d’espoir de progresser dans la vie, ni de progrès partagé sans éducation. Quoi qu’on en dise, celle-ci reste le meilleur moyen de sortir les populations de la pauvreté en leur offrant la possibilité d’accéder à l’autonomie et d’avoir des conditions de vie plus dignes. Or, près de 260 millions d’enfants dans le monde, qui sont en âge d’aller à l’école, n’y ont pas accès. On ne peut pas, on ne doit pas l’accepter. Sans progrès dans ce domaine, il ne peut y avoir de développement durable, ni même tenable.”
JBC : La défense des droits de l’enfant est-elle toujours d’actualité dans un pays comme la France ?
YR: “La France a bien entendu ratifié la Convention des droits de l’enfant en 1990. C’est d’ailleurs notre pays qui a souhaité que le 20 novembre devienne la journée internationale pour le droit des enfants. Notre pays compte d’ailleurs un défenseur des droits, Jacques Toubon, chargé de veiller notamment à la situation des enfants et au respect de leurs droits. Et comme tout autre pays adhérent à la Convention, la France doit rendre des comptes auprès des Nations-Unies. Bien sûr, dans notre pays, les enfants sont particulièrement bien protégés et ont accès à des conditions de vie tout à fait décentes, sans comparaison avec d’autres pays. Mais, pour autant la situation n’est pas parfaite. Les violences restent encore bien trop nombreuses. Plus de deux enfants meurent chaque semaine du fait de violences ou de négligences. Et je ne parle ici que des décès. Sans aboutir à la mort, la maltraitance a des conséquences graves.”
JBC : Que peut-on faire ?
YR : “Prévenir, informer, sensibiliser, bien sûr. Mais surtout refuser de fermer les yeux et ne pas hésiter à prévenir les services sociaux. Rien ne justifie l’indifférence, surtout lorsqu’il s’agit des enfants.”
Interview parue dans le journal de Bois-Colombes n°134